Face à l’urgence climatique, le secteur du bâtiment doit accélérer sa mue énergétique. Le bâtiment représente près de 44 % de l’énergie totale consommée en France, devant les transports et l’industrie. Ce secteur est responsable d’environ 30 % des émissions de CO2. L’entrée en vigueur de la réglementation thermique 2020 a pour but de réduire cette consommation d’énergie et l’émission de gaz polluants responsables de l’effet de serre grâce, à la construction de bâtiments autonomes et favorisant l’économie d’énergie.
Ce 16 février 2020, environ 300 personnalités ont signé, dans la presse, une tribune commune alertant sur la nécessaire transition écologique et énergétique que doit opérer, selon elles, le secteur du bâtiment et des travaux publics.
Tous appellent à un débat public et formulent, à la clé, quelques propositions. Leur tribune débute par un constat d’« urgence à décarboner en profondeur les secteurs des transports, de l’agriculture et du BTP », ajoutant qu’« au-delà des niaiseries culpabilisantes habituelles, aucun débat sérieux n’a eu lieu, ne fût-ce que pour informer les citoyens des choix de société qui s’offrent à eux ». L’argumentaire des signataires se fonde notamment « sur la base du travail d’une centaine d’experts », selon lequel « il a été démontré que l’on pourrait économiser 90 millions de tonnes équivalent carbone en dix ans et ainsi diminuer de 20% les émissions de gaz à effet de serre (GES) de la France rien qu’en changeant nos matériaux et systèmes constructifs ». « Ces chiffres d’émissions peuvent donc se réduire drastiquement si l’on remplace ces matériaux cuits par des matériaux crus : du bois, de la fibre et de la terre crue… Par ailleurs, changer nos matériaux de construction permet non seulement de diminuer les émissions de CO2 mais aussi d’en stocker. »
Les signataires demandent à ce que quatre propositions soient étudiées de plus près par la puissance publique :
- l’ouverture de plusieurs lycées professionnels spécialisés en écoconstruction qui formeraient aux techniques d’isolation en fibres et de construction en terre crue ;
- la mise en place d’un indicateur précisant la quantité de carbone stockée dans le bâtiment ;
- l’utilisation de fibres végétales dans les habitations mal isolées pour lutter contre la précarité énergétique ;
- la remise au Parlement d’un rapport sur l’opportunité de développer des alternatives aux matériaux cuits.
La réglementation thermique
La réglementation thermique dite « RT » encadre les professionnels du bâtiment, et concerne la construction de nouveaux ouvrages. La première réglementation RT date de 1974. C’est grâce à ses constantes évolutions que le secteur du bâtiment s’approprie petit à petit une dynamique d’amélioration des matériaux de construction et d’optimisation de la consommation énergétique.
La réglementation joue un rôle important mais ne peut pas impulser seule un véritable « virage vert » du secteur. La mobilisation des acteurs financiers pourrait provoquer cet effet de levier. Chacun doit être sensibilisé sur la chaîne de valeur partagée créée par l’amélioration des performances environnementales et sociétales d’un bâtiment.
De la RT 2012 à la RT 2020
Aujourd’hui, la règlementation thermique applicable est la RT 2012. Elle devrait être remplacée au cours de l’année par la RT 2020.
Cette dernière est bien plus ambitieuse et plus en adéquation avec les objectifs que s’est fixée la France en matière de politique environnementale. L’objectif est de tendre vers des bâtiments à la consommation énergétique optimisée, réduite, et moins nocive pour l’environnement puisque les normes RT 2020 ciblent le zéro gaspillage énergétique, ainsi que la production d’énergie (renouvelable).
Ce concept appelé BEPOS, Bâtiments à Énergie POSitive, concerne les bâtiments produisant plus d’énergie qu’ils n’en consomment pour assurer le confort de ses occupants. L’utilisateur devient acteur de la transition énergétique.
Initialement, les nouvelles normes RT 2020 devaient devenir obligatoires pour toutes les constructions neuves à fin 2020. Même si plusieurs expérimentations ont été menées à travers le territoire et que d’autres sont constamment en cours, notamment via le label Énergie + Carbone – (E+C-), la concertation des différentes parties prenantes visant à élaborer les normes s’avère plus compliqué que prévu. C’est pourquoi il est possible que l’entrée en vigueur de la loi soit repoussée à 2025.
Le label E+C- : Énergie + Carbone –
E+C- est un label créé pour inciter les professionnels du secteur à lutter contre le changement climatique pour la construction neuve. Afin de généraliser les bâtiments à énergie positive et à faible empreinte carbone, l’État a lancé un label volontaire dédié à la valorisation de ces deux objectifs.
Deux grandes orientations pour la construction neuve :
- La généralisation des bâtiments à énergie positive, qui devront non seulement diminuer drastiquement le recours aux énergies fossiles au profit des énergies renouvelables, notamment en optant pour une isolation performante elle aussi écologique, mais aussi générer un surplus d’énergie qui sera redistribué ou autoconsommé.
- Le déploiement de bâtiments à faible empreinte carbone tout au long de leur cycle de vie, depuis la conception jusqu’à la démolition.
Quels sont les bénéfices de cette certification pour le constructeur ?
Avec un label E+C- :
- Vous préparez la construction des bâtiments performants aux « standards » de demain.
- Vous êtes acteurs de la future réglementation. Le retour d’expérience tiré de cette démarche permettra de calibrer les exigences de la future réglementation pour construire des bâtiments performants à coûts maîtrisés.
- Vous servez de moteur à l’innovation dans le champ du bâtiment, de ses systèmes énergétiques et de procédés constructifs à faible empreinte carbone.
- Vous disposez d’un outil de valorisation de votre actif immobilier vous permettant d’attester et de mettre en avant les performances de votre bâtiment en termes d’énergie et de carbone.
- Vous démontrez que votre immeuble possède une enveloppe et des équipements permettant de limiter les déperditions énergétiques, les consommations d’énergie et les émissions de GES (Gazes à Effet de Serre).
- Vous bénéficiez d’une reconnaissance en tant qu’acteur responsable avec un affichage dédié. Vous améliorez votre image en faisant preuve d’exemplarité.
- Vous optez pour un véritable atout pour louer ou vendre votre bâtiment.
- Vous pérennisez votre investissement dans la durée en anticipant les évolutions réglementaires.
- Vous pouvez bénéficier du bonus de constructibilité, c’est-à-dire un dépassement des règles de constructibilité au maximum de 30 % (en fonction des collectivités), pour les constructions neuves faisant preuve d’exemplarité énergétique ou environnementale, ou étant à énergie positive.
Le bâtiment passif utilise principalement la biomasse comme matière première, soit, en grande majorité, le bois. Matériau renouvelable, il a pour avantage d’être performant en terme acoustique et thermique, et contribue au confort d’été.
Le bois et les matériaux biosourcés en général (paille, terre, chanvre, liège, laine, ouate de cellulose…), étant pour la plupart des matériaux issus de la croissance des plantes, sont des puits de stockage du CO2, tant que le matériau n’est pas détruit. Cette capacité à piéger le CO2, tout en étant souvent issus de filières « locales » en font des produits non seulement bas carbones mais aussi dotés d’une haute performance énergétique.
Depuis le décret du 19 décembre 2012 sur la création du label « biosourcé », la matière biosourcée issue de la biomasse végétale ou animale peut s’utiliser comme matériau de construction pour le bâtiment.
Dans le rapport de ses observatoires de 2017, l’organisme Certivéa, mettait en avant les tendances de ce que l’on appelle l’immobilier « vert » en France. Le secteur jouissait alors d’une bonne santé : une croissance annuelle de + 8 % des attributions de certifications NF HQE, et + 7 % du nombre d’opérations dans les régions.
Dans un contexte où l’environnement est de plus en plus important aux yeux des consommateurs, parallèlement à un rapport qualité prix de la construction sans cesse meilleur, on peut légitimement penser que le taux de croissance du marché de « l’immobilier vert » n’a pu qu’augmenter depuis 2016.
Selon Patrick Nossent, Président de Certivéa :
« Un bâtiment durable certifié rapporte plus, à plus de monde et plus longtemps. » Les retours d’expérience sur les bâtiments certifiés montrent que les parties prenantes du bâtiment certifié durable, de l’investisseur à l’usager final et jusqu’aux pouvoirs publics, se retrouvent dans un cercle vertueux, où la certification joue le rôle de tiers de confiance.
Grâce à une isolation performante et des matériaux de construction spécifiques, la maison passive consomme en moyenne 4 fois moins d’énergie qu’une maison traditionnelle. En plus d’être moins énergivore, la maison passive propose un confort de vie plus important, sans courant d’air, et avec une température homogène.
La construction d’un bâtiment de type BEPOS représente un investissement plus important qu’un bâtiment « classique » de l’ordre de 3 à 10 %, principalement dû à un besoin de main d’œuvre plus conséquent. Cependant, les économies réalisées au quotidien, grâce à une consommation d’énergie nulle, ou grâce à la revente d’énergie à EDF, assurent une rentabilité rapide. De plus, un bâtiment aux normes RT 2020 affiche une plus-value au moment de la revente. Le prix des énergies étant, lui, en constante augmentation, le retour sur investissement d’un bâtiment aux normes RT 2020 sera encore plus rapide.
Des externalités positives qui fédèrent occupants, acteurs financiers et pouvoirs publics.
Des externalités positives matérielles et immatérielles, incontestées, et pour la plupart quantifiables, qui fédèrent occupants, acteurs financiers et pouvoirs publics.
Les occupants
Pour les occupants, l’amélioration des performances du bâtiment se traduit immédiatement par des économies de charges. En France, le dernier indice MSCI IPD montre un écart de 11 % en faveur des immeubles certifiés sur l’ensemble des charges d’exploitation, dont 16 % pour les coûts des assurances, 19 % pour le coût de l’énergie et 21 % pour les services aux occupants.
On identifie également des gains de confort et de productivité pour les collaborateurs. De nombreuses études démontrent la corrélation entre l’amélioration de l’environnement de travail (lumière naturelle, diminution du bruit, confort thermique, accessibilité), les capacités cognitives, et le taux d’absentéisme qui diminuerait de 10 % lorsque des bureaux ont une vue sur l’extérieur.
Les acteurs financiers
Pour les acteurs financiers, ces bénéfices immatériels se traduisent par une attractivité accrue pour les bâtiments. Leur commercialisation est, in fine, plus aisée, et les taux de vacance plus faibles, au bénéfice des propriétaires et investisseurs.
Cette moindre exposition aux risques permet de réduire l’obsolescence des bâtiments, tant technique que réglementaire. Pour les investisseurs, cela peut induire des primes d’assurance réduites et une plus grande facilité d’obtention de prêts auprès d’assureurs et de banquiers qui ont, eux-mêmes, réduit leurs risques. L’anticipation des exigences réglementaires et des attentes croissantes des utilisateurs permet également de réduire les provisions pour travaux futurs, et donc, les charges futures qui, sinon, pèseraient sur les propriétaires.
Les pouvoirs publics
Enfin, les pouvoirs publics peuvent choisir de valoriser la réduction des coûts sociétaux, notamment permise par la préservation des territoires, la lutte contre la pollution, la réduction des maladies professionnelles etc. Valorisation sous la forme d’avantages fiscaux ou d’incitations à destination des professionnels qui optent pour ces solutions durables.
Dans le benchmark qu’il réalise depuis 2010, MSCI IPD étudie l’écart de performance financière entre bureaux verts et bureaux non verts haut de gamme. Fin 2018, cet écart s’élevait à 5 % en termes de valeur locative de marché, 8 % en termes de valeur vénale, et 26 % en termes de rendement global.
Les résultats de l’étude posent la certification comme le garant de la confiance entre tous les acteurs.
Sources :
http://www.planbatimentdurable.fr/experimenter-la-future-reglementation-le-label-e-c-r222.html
https://www.batiactu.com/edito/300-personnalites-signent-tribune-transition-ecologique-58825.php
https://www.certivea.fr/offres/label-e-c#
https://www.quelleenergie.fr/magazine/batiments-durables/evolutions-immobilier-durable-france-57185/